L'absinthe (Artemisia absinthium L.) aussi nommée grande absinthe en opposition avec la petite absinthe (Artemisia Pontica) est une plante de la famille des Astéracées. Cet article ne traitant que cette plante, se référer à Spiritueux aux plantes d'absinthe pour la liqueur.
Noms communs : absin, aluyne, aloïne, armoise, herbe sainte, herbe aux vers, menu alvine.
Plante vivace, herbacée, pouvant mesurer jusqu'à 1 mètre. Plante recouverte de poils soyeux blancs argentés et de nombreuses glandes oléifères. La tige est de couleur vert argent, droite, cannelée, ramifiée et très feuillée.
Les feuilles sont alternes, gris verdâtre sur le dessus et presque blanches et soyeuses sur le dessous. Les feuilles basiliaires mesurent jusqu'à 25 centimètres de long et sont longuement pétiolées. Les feuilles caulinaires sont brièvement pétiolées, moins divisées. Les feuilles au sommet peuvent même être simples et sessiles (sans pétiole). La floraison a lieu de juillet à septembre. Les fleurs sont jaunes, tubulaires, réunies en capitules (Composée) globuleux, penchés, à leur tour réunis en panicules feuillés et ramifiés.
La plante possède un rhizome dur.

Originaire des régions continentales à climat tempéré d'Europe, d'Asie et d'Afrique du Nord. Naturalisée par ailleurs. Elle y pousse sur les terrains incultes et arides, sur les pentes rocheuses, au bord des chemins et des champs.
Peut facilement être cultivée dans un terrain sec et pauvre. À mettre en exposition chaude sur sols fertiles, et semi-lourds. Elle préfère les sols calcaires et riches en azote. Se reproduit par éclat des vieux pieds à l'automne ou au printemps, éventuellement par semis en mars avril.
Utilisée comme vermifuge, dans les maladies de l'estomac, pour provoquer les règles, dans le combat contre la paresse, contre le mal de mer et ses nausées, cette plante peut être utilisée en infusion avec du vin, de la bière en poudre ainsi qu'en décoction. En usage externe, on recourt à un cataplasme chaud, mais également à la décoction.
- L'absinthe était la plante d'Artémis, déesse grecque responsable des morts violentes. Dans l'Antiquité gréco-romaine, on l'utilisa en infusion comme antidote du poison (ciguë) ou pour ses vertus abortives. Au XVIIe siècle, l'absinthe servait d'insecticide.
- L'absinthe est surtout connue pour avoir été l'ingrédient de base d'une boisson populaire au XIXe siècle. Rimbaud et Verlaine étaient des buveurs d'absinthe. Interdite dans de nombreux pays depuis le début du XXe siècle, elle est de nouveau autorisée dans certains pays depuis quelques années.
- Vin d'absinthe
- En Afrique du Nord, où elles sont appelées chiba (et non pas chih (artemisia herba-alba) qui est une autre plante qui pousse surtout dans les plaines désertique de la région orientale marocaine et est utilisable en médecine populaire en infusion ou en décoction pour traiter les spasmes abdominaux), les feuilles d'absinthe sont parfois ajoutées au thé à la menthe classique (en petite quantité, le goût étant très fort) soit pour leur goût particulier et très apprécié, soit pour pallier la rareté de la menthe en hiver, soit tout simplement pour réchauffer le corps.
- En bouquet sec, l'absinthe éloigne les insectes.

Utilisation:
- Préparation :
- Séchage rapide à l'ombre, ou par chaleur artificielle, au four de 35° à 40 °C au maximum ou au micro-onde.
- Infusion : mettre 5 gr de sommités fleuries séchées par litre d'eau bouillante, prendre une petite tasse 2 à 3 fois par jour.
- Macération : on peut obtenir du vin ou de la liqueur. Pour le ratafia il faut laisser macérer 15 jours dans 1 litre d'eau de vie à 60° le mélange de 40gr de feuilles d'absinthe, 20 gr de baie de genièvre, 5 gr de cannelle et 1 gr de tige fraîche d'angélique. Après avoir filtré on ajoute le mélange de 1/3 l d'eau 15 gr d'eau de fleur d'oranger et 250 gr de sucre
- Poudre : L'herbe ainsi employée peut servir de vermifuge : la dose pour une potion est alors de 2 à 3 grammes.
- Teinture (également vendue en pharmacie) : 10 à 30 gouttes dans 100 ml d'eau, prendre 2 à 3 fois par jour, 3 minutes avant le repas (comme tonique) ; 20 à 60 gouttes 3 fois par jour dans 50 ml d'eau (pour la bile).

- Précautions d'emploi :
- La plante possède des substances actives dangereuses.
- L'utilisation de la drogue doit être limitée.
- Ne pas administrer aux femmes enceintes.
Indiquée en cas d'insuffisance de
suc gastrique, active la circulation sanguine dans les régions du bassin (
emménagogue), l'excrétion
biliaire, et agit comme désinfectant.
Les
spiritueux aux plantes d'absinthe sont un ensemble de
spiritueux, couramment appelés simplement « absinthe », « fée verte » ou encore « la bleue.L'origine précise de l'absinthe est incertaine. En Égypte ancienne, l'usage médical d'extraits d'absinthe est mentionné dans le
Papyrus Ebers (entre -1500 et -1600).
Pythagore et
Hippocrate (460-377 av. J.-C.) parlent d'alcool d'absinthe et de son action sur la santé, son effet aphrodisiaque et sa stimulation de la création. Les Grecs anciens consommaient également du vin aux extraits d'absinthe,
absinthites oinosCe n'est que vers la fin du
XVIIIe siècle que l'on retrouve la première trace attestée d'absinthe distillée contenant de l'anis vert et du fenouil. La légende veut que ce soit le docteur Pierre Ordinaire qui ait inventé la recette vers
1792. Les travaux de Marie-Claude Delahaye et de Benoît Noël ont montré qu'il n'en était rien et que cette recette était celle d'une rebouteuse suisse : Henriette Henriod pour M.C. Delahaye ou Suzanne-Marguerite Henriod pour B. Noël. Celle-ci avait mis au point la première recette d'absinthe, qui était un breuvage médicinal. Cette question ne semble toutefois pas définitivement tranchée.Quoi qu'il en soit
Daniel Henri Dubied acquiert la recette auprès de la mère Henriod en
1797et ouvre, avec son gendre
Henri Louis Pernod, la première distillerie d'absinthe à
Couvet en Suisse. On trouve dans le livre de raison de ce dernier la première recette d'absinthe apéritive, datée de 1797. Ils fondent en
1798 la première distillerie, la maison Dubied Père & Fils. En
1805,
Henri Louis Pernod prend ses distances avec son beau-père et monte sa propre distillerie à
Pontarlier :
Pernod Fils qui deviendra la première marque de spiritueux français
.Pendant une trentaine d'années l'absinthe reste une boisson régionale essentiellement consommée dans la région de Pontarlier. En
1830, les soldats français colonisent l'
Algérie et les officiers leur recommandent de diluer quelques gouttes d'absinthe dans l'eau pour faire passer les désagréments de la
dysenterie. Les soldats, à leur retour en France, popularisent cette boisson à travers tout le pays.
Relativement chère au début des années
1850, elle est surtout consommée par la bourgeoisie. Puis, sa popularité ne cesse de grandir puisqu'en
1870, début de la
guerre franco-prussienne, l'absinthe représente 90% des apéritifs consommés en France. La production d'absinthe augmente, entraînant une diminution des prix et une popularité grandissante.
La période de
1880 à
1914, début de la
première guerre mondiale, marque une explosion de la production et une chute drastique des prix. La production française passe de 700 000 litres en
1874 à 36 000 000 de litres en 1910
. Des absinthes de mauvaise qualité, surnommées "sulfates de zinc" en raison de la coloration obtenue grâce à ce composé chimique, prolifèrent
. Un verre d'absinthe est alors moins cher qu'un verre de vin.Le
11 août 1901, l'usine
Pernod à
Pontarlier prend feu et un employé de l'usine prend l'initiative de vider les cuves d'absinthe dans le
Doubs, afin d'éviter qu'elles n'explosent. On raconte que les soldats en garnison à Pontarlier remplissaient leur casque de ce breuvage. Le lendemain, on en retrouvait des traces, à la source de la
Loue. Cet incendie a permis de découvrir l'origine de la rivière de la
Loue, tout en constituant la première coloration de l'histoire de l'hydrologie.

Cette
fée verte connut un vif succès au
XIXe siècle, mais elle fut accusée de provoquer de graves intoxications (contenant entre autres du méthanol, un alcool neurotoxique) , décrites notamment par
Émile Zola dans
L'Assommoir et ayant sans doute provoqué la folie de certains artistes de l'époque (
Baudelaire,
Van Gogh...)
[réf. nécessaire]. Elle est également connue pour son effet aborti
on.
Dès
1875, les ligues antialcooliques, les syndicats, l'Église catholique, les médecins, la presse, se mobilisent contre «
l'absinthe qui rend fou »
. En
1906, la ligue nationale française antialcoolique recueille 400 000 signatures dans une pétition
. En 1907, une grande manifestation a lieu à
Paris rassemblant les viticulteurs et les ligues anti-alcooliques. Leur mot d'ordre : «
Tous pour le vin, contre l'absinthe ». En
1908, le groupe antialcoolique qui s'est constitué au
Sénat veut faire voter trois mesures :
- interdiction de l'absinthe
- limitation du nombre des débits de boissons
- suppression du privilège des bouilleurs de cru
Ceci conduisit à son interdiction dans de nombreux pays, (en France à partir du 16 mars 1915, en Suisse du 7 octobre 1910 au 1er mars 2005) car les ligues de vertus disaient d'elle « qu'elle rend fou et criminel, fait de l'homme une bête et menace l'avenir de notre temps ».
En réalité, il est clairement dit dans le projet d'interdiction de l'absinthe en France que la boisson est interdite pour lutter contre l'alcoolisme. Extrait : « À diverses reprises, l'Académie de médecine a signalé le grand intérêt que présente, au point de vue de la santé publique et de l'avenir même de la race, l'organisation en France d'une lutte active contre l'alcoolisme. De son côté, l'Académie des sciences a, au cours d'une de ses récentes séances, apporté à ces vues l'appui de sa haute autorité en émettant un vœu pressant en faveur de l'adoption prochaine de diverses mesures propres à enrayer le fléau. Il a paru au gouvernement que le moment était venu d'entrer résolument dans la voie qui lui était ainsi tracée et qu'il convenait notamment de réaliser, dès à présent, une des mesures qui de tout temps ont été considérées, à juste titre, comme pouvant le plus aisément contribuer pour une large part à la restriction du mal : mettre un terme à toute consommation de l'absinthe et des liqueurs similaires. »
Après l'interdiction, les anciennes marques d'absinthes se reconvertissent dans des anisés sans sucre qui se préparent comme l'absinthe. En 1932, Paul Ricard invente le Pastis qui est le premier anisé à connaître un succès presque équivalent à celui de l'absinthe.
Le 2 novembre 1988, un décret, signé par Michel Rocard, autorise et règlemente la présence de thuyone (principale molécule de l'huile essentielle d'absinthe, présente dans la grande et la petite absinthe) dans les boissons et l'alimentation, ce qui permet techniquement de produire à nouveau de l'absinthe en France. En 1999, la première absinthe française depuis 1915 est produite : la Versinthe verte, qui contient de la grande absinthe. Son apparition et son étiquetage (absinthe) met en évidence un hiatus entre le décret européen de 1988 et l'interdiction de l'absinthe en France de 1915 toujours en vigueur. Plutôt que d'abolir cette loi, le gouvernement pare au plus pressé en votant un aménagement du décret et en attribuant une nouvelle appellation légale à l'absinthe : « spiritueux aromatisé à la plante d'absinthe » et en complétant la règlementation européenne (35 mg/l de thuyone maximum) d'un taux de fenchone et de pinocamphone à ne pas dépasser (respectivement 5 mg/l et 10 mg/l). Depuis le 1er mars 2005, la distillation de l'absinthe est à nouveau autorisée en Suisse, afin de pouvoir demander une AOC et ainsi protéger l'appellation (à condition, entre autres, que la teneur en thuyone ne dépasse pas 35 mg/l).
La liqueur d'absinthe, comme autrefois, titre entre 45° et 80°. Elle est produite notamment dans les distilleries de Fougerolles en Haute-Saône, à Pontarlier dans le Doubs, ville dont elle fit la richesse jusqu'à l'interdiction de 1915, et à Saumur par la distillerie Combier. On trouve aussi deux distilleries en Provence. Elle est notamment de nouveau fabriquée au Val-de-Travers (région de Suisse romande) berceau de l'absinthe, dans plus d'une douzaine de distilleries.
La préparation de l'absinthe est qualifiée de rituel en raison des nombreux accessoires spécifiques nécessaire à son élaboration ainsi qu'à son aspect codifié.
L'absinthe pure est tout d'abord versée dans un verre spécifique sur lequel on place une cuillère à absinthe. On place ensuite un demi-sucre ou un sucre sur la cuillère sur lequel on verse de l'eau glacée au goutte à goutte. Comme le pastis, l'absinthe se dilue dans trois à cinq fois son volume d'eau. La manière de préparer l'absinthe joue un rôle capital dans son goût final en permettant aux arômes de plantes de se libérer et de prendre de l'ampleur face aux autres arômes.
Durant ce processus, les ingrédients non solubles dans l'eau (principalement ceux de l'anis vert ou étoilé, ainsi que le fenouil) forment des émulsions ; ce qui trouble l'absinthe.
Avec l'accroissement de la popularité de la boisson au XIXe siècle, l'usage de la fontaine à absinthe se répandit. Cette fontaine particulière permet de verser l'eau au goutte à goutte sans avoir à le faire à la carafe, ainsi que de servir un grand nombre de verres à la fois.Traditionnellement, le sucre ne se brûle pas. Ce n'est qu'en 1990 dans les discothèques tchèques qu'un rituel où le sucre est brûlé est apparu, probablement pour attirer l'attention des clients sur cet apéritif
Depuis le 1er mars 2005, il est possible de distiller de l'absinthe en Suisse tout à fait légalement, soit chez un distillateur « à façon » — il en existe 400 en Suisse —, soit en demandant une concession à la Régie fédérale des alcools, à Berne. Pour l'obtenir, il faut au moins distiller 500 litres d'alcool à 100% en volume (par année), soit près de 950 litres d'absinthe à 53% vol. La concession n'est pas facilement accordée, à moins d'entrer dans une coopérative de distillateurs qui louent ensemble un local pour y installer leurs alambics. Les périodes de distillation sont annoncées à l'inspecteur régional de la Régie fédérale des alcools qui déplombe l'alambic et replace une cordelette avec un plomb quand la distillation est terminée.Les achats d'alcool sont soumis à une taxe : environ 29 francs suisses (20 € environ) par litre d'alcool à 100% en volume. Le distillateur « à façon » doit remplir une « déclaration de distillation » dans laquelle il indique la quantité des matières première (alcool), la quantité des spiritueux produits (absinthe), et la quantité des flegmes (produits de tête et de queue de distillation).
En Suisse, la personne qui distille et qui veut vendre son produit est soumise à l'auto-contrôle. Elle doit faire déterminer par un laboratoire spécialisé (Laboratoire cantonal à Neuchâtel), le taux de thuyone, de fenchone et le % en volume. L'analyse coûte 350 francs suisses (220 euros environ).
À cela, il faut ajouter une patente cantonale pour la vente du produit, qui coûte une centaine de francs, plus 2% du chiffre d'affaire présumé. Pour vendre dans toute la Suisse, il faut débourser plus de 500 francs suisses (environ 320 euros), si les quantités vendues hors du canton de production dépassent les 400 litres par année.

La
thuyone est un excitant. Une absinthe légale avec 20-25 mg de thuyone est déjà considérée excitante si l'on dépasse les usages prescrits pour un apéritif au Val-de-Travers, à savoir une ou deux absinthes bien tassées avec de l'eau glacée, et ensuite une « rincette », c'est-à-dire une absinthe légère avec beaucoup d'eau. Le nom de "Rincette" fut utilisé par la distillerie Kübler, de Môtiers/Val-de-Travers/Suisse, pour distiller une boisson apparentée à l'absinthe, du temps où celle-ci était encore interdite (avant le 1er mars 2005 en Suisse). La "Rincette" est encore distillée de nos jours, elle titre à 45 % vol.
Les études contemporaines pour déterminer les effets de la thuyone
sur le comportement (et aussi celles de la Rutgers University) montrent qu'il faudrait ingérer plusieurs litres d'absinthe pour parvenir à une dose toxique de thuyone. Les effets seraient alors bien sûr masqués par les effets toxiques de l'alcool seul, ainsi que du méthanol, neurotoxique.
Il est également probable que les effets ressentis par certaines personnes soient dus à d'autres composants que la thuyone seule.
La France limite la fenchone (principale molécule de l'huile essentielle du
fenouil) dont le taux ne doit pas dépasser 5 mg/l, tandis que le taux de fenchone n'est pas limité en
Suisse.
Certaines absinthes du Val-de-Travers, dites « suisses » au
XIXe siècle, ne peuvent pas être vendues en France pour cette raison : les graines de fenouil suisse contiennent beaucoup plus de fenchone que le fenouil du sud de la France, avec lesquelles sont produites les absinthes françaises.